Être un phare dans la nuit (5)

⏳ Temps de lecture: 5 minutes

Dans cette cinquième partie, M. Reynouard aborde les événements et les décisions qui l’ont amené à se séparer de sa famille.

Nous lui avons notamment demandé ce qu’il pense du sort de ses huits enfants, ainsi que la raison pour laquelle il a déclaré un jour que ses enfants ne lui manquent pas.

Pour ceux qui les auraient pas encore lues:

Pour en savoir plus sur la façon dont nous sommes arrivés au texte que nous publions ici, veuillez vous reporter à l’introduction de cette série d’articles.

Nous vous souhaitons une agréable lecture

=====

[SC. De votre point de vue, vos adversaires et ceux qui les servent vous sont donc bénéfiques. Toutefois, leur action fait souffrir vos proches, à commencer par vos enfants qui, depuis 2011, vivent séparés de leur père. D’après la conception de l’existence que vous nous avez exposé plus haut, vos enfants devaient connaître une jeunesse sans père, afin de pouvoir réaliser leur mission de vie, et la Providence s’est servi de vous pour leur faire vivre cette épreuve. Mais n’est-il pas un peu facile d’invoquer les décrets de la Providence?]

VR. Je ne suis pas un Ponce Pilate: je sais que nous portons la responsabilité des tous nos actes libres. C’est librement que j’ai commis la faite épouvantable d’abandonner ma famille. Par conséquent, j’en porte l’entière responsabilité et j’en rendrai compte.

Attention toutefois à ne pas vous méprendre sur ma pensée: je n’ai pas dit que la Providence avait décidé de tout; j’ai dit que la Providence « se sert de tout », ce qui est très différent. Si la Providence décidait à l’avance, alors nous serions prédestinés; mais il n’en est rien. Le libre arbitre existe.

La vie est comme un film dont, sur Terre, chacun écrit quotidiennement le scénario ne posant des actes libres. Plongés dans le temps, nous ignorons ce que sera la suite du film: les images doivent défiler pour que nous le découvrions et que nous poursuivions l’écriture de l’histoire. Cependant, Dieu, pour sa part, est hors du temps: il se tient dans l’éternel présent et il voit toute la bobine, du début à la fin.

[SC. C’est la raison pour laquelle l’Apocalypse de saint Jean précise que les noms des élus sont déjà inscrits dans le Livre de la Vie. Cela signifie que Dieu connait déjà la fin de l’histoire. Toutefois, cette histoire, nous l’avons écrite librement, jour après jour, en posant des actes. Par conséquent, nous sommes responsable de notre destin.]

VR. Exactement, et quand on a compris cela, on peut mieux juger mon cas. Mes enfants devaient connaître une enfance ou une adolescence dans père: cela faisait partie de leur chemin de vie. Dieu sachant que j’abandonnerai ma famille, sa Providence les a fait naître dans mon foyer. Mais je le répète encore une fois: c’est librement que j’ai commis cette faute épouvantable. Dès lors, j’en porte la responsabilité qui me revient.

Reconnaître ses fautes est un premier pas. Cependant, il faut aller plus loin et tenter de les réparer. Voilà pourquoi j’ai tenté de reprendre contact. J’ai envoyé une carte à mon épouse pour lui demander pardon: je l’ai fait humblement, c’est-à-dire sans lui formuler le moindre reproche, ne considérant que mes propres actes. J’ai également écrit à mes enfants en âge de comprendre. Certaines de mes tentatives ont été couronnées de succès, d’autres non.

[SC. Pourtant, vous avez déclaré que vos enfants ne vous manquent pas. Ces propos ont profondément choqué.]

V. Je le comprends sans peine, mais un jugement objectif nécessite de connaître toute l’histoire. Ceux qui me connaissent savent combien j’aimais, et j’aime toujours, mes enfants: je m’en occupais énormément, jouant avec eux, leur lisant des livres, les accompagnant au parc…

À l’automne 2015, alors que j’étais seul en exil à Londres, j’ai sombré dans le désespoir en pensant à tout ce que j’avais perdu par ma faute. J’ai alors sérieusement envisagé le suicide. Le révisionnisme m’en a préservé: j’avais encore beaucoup à dire… On pourrait donc penser que c’est le révisionnisme, et non ma famille, qui m’a sauvé; mais attendez la suite.

Le révisionnisme étant ma mission de vie, je refusais d’abandonner. Toutefois, un fait était certain: si j’étais resté à Bruxelles avec ma famille, j’aurais été arrêté et neutralisé depuis longtemps. Par conséquent, aucun compromis n’était plus possible entre ma vie familiale et ma vie de révisionniste.

Ce constat m’a poussé à la réflexion. Je me suis alors souvenu d’une planche de Kaleunt, cette bande-dessinée de Dimitri, qui raconte l’histoire d’un sous-marin allemand traqué par des appareils alliés pendant la seconde Guerre mondiale. Alors que l’équipage du sous-marin est en danger de mort, le capitaine demande au second qui pleure de désespoir: « Vous auriez préféré mourir pour les démocratie peut-être? ». « J’aurais préféré vivre », répond le second. Ce qui lui vaut cette réplique: « Ce n’est pas si simple. »

Je n’ai jamais oublié ce dialogue. En 2015, il m’est venu à l’esprit. Transposé au combat révisionniste, j’ai imaginé un dialogue du même genre entre le professeur Faurisson et moi-même:
« Pr Faurisson — Vous auriez préféré mener une vie de simpe professeur en compagnie de votre famille, peut-être?
« Moi — J’aurais préféré combattre pour le révisionnisme et vivre avec ma famille.
« Pr Faurisson — Ce n’est pas si simple. »

J’ai alors réalisé que certains destins nécessitent des déchirements. Depuis 2003, tous mes procès me valent de la prison ferme. En 2008, la justice française et la justice belge m’ont condamné à un an d’emprisonnement, peine que j’ai purgée à la maison d’arrêt de Valenciennes en 2010-2011. Fin 2014, les ennuis judiciaires ont recommencé: plainte, garde-à-vue, perquisitions, saisie…

Début 2015, les juges de Coutances m’infligèrent deux ans de prison ferme. À peine condamné, une nouvelle plainte me valut d’être convoqué à la Police judiciaire de Paris. J’ai alors compris qu’il fallait m’exiler au plus vite, c’est-à-dire partir à l’aventure. Avec une famille, c’eût été impossible.

Notez d’ailleurs que ma compagne, Marie, a refusé de me suivre: nous avions eu un enfant et, pour elle, il était hors de question de fuir vers l’inconnu; alors imaginez avec huit enfants!

J’ajoute qu’après mon départ précipité, Marie a été agressée. Deux individus l’attendaient dans le hall de l’immeuble. Notre appartement était au rez-de-chaussée. Alors qu’elle revenait de la ville, ils l’ont poussé à l’intérieur et l’ont contrait à s’assoir. Terrorisée, la pauvre a dû non seulement donner mon numéro de téléphone, mais aussi m’appeler afin d’attester qu’il s’agissait bien du mien.

Les inconnus lui ont montré l’adresse de ses parents, sans doute pour l’intimider et la dissuader de porter plainte. Leur stratagème a d’ailleurs réussi, puisque Marie n’a pas osé se rendre à la Police. J’ignore qui étaient ces individus. Marie n’a rien pu (ou n’a pas voulu) me dire.

Elle était terrorisée, et je la comprends, car elle avait sa petite fille. Alors imaginez Marina et nos huit enfants! Je me suis dit qu’avoir abandonné ma famille la protégeait: personne ne pourrait s’en servir ni pour me localiser ni pour m’intimider.

De plus, si, un jour, un de mes enfants était ennuyé à cause de son nom, il pourrait toujours répondre: « Oui, Vincent Reynouard est bien mon père; mais il nous a abandonnés et nous n’avons plus de contact avec lui depuis des années. »