Le piège de l’indignation satisfaisante — une lettre de Vincent Reynouard

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Nous reproduisons ici une lettre que Vincent Reynouard a rédigée en réponse à un courrier qui lui avait aimablement adressé un jeune militant, voilà quelques mois.
Vincent Reynouard y aborde notamment les questions de la décadence de l’Europe et des combats faciles adoptés par certains dissidents qui se complaisent secrètement dans cette décadence.


Cher Ami,

[…]

Je vous rassure, l’éloignement de ma terre natale ne me pèse aucunement, et ce pour une raison très simple: je n’ai pas de terre natale. Du côté de mon père, ma famille venait d’Ardèche et d’Alsace, mais elle vivait en Algérie où le cœur de mon père est resté.

Du côté de ma mère, ma famille venait de Suisse et de l’Hérault. Mes parents se sont rencontrés à la faculté de médecine de Paris, où ils résidaient alors, et je suis né à Boulogne-Billancourt, avant que nous nous installions en Normandie, trois ans plus tard.

Mes ancêtres sont donc totalement dispersés, issus de milieux très divers et parfois même de religions qui, par le passé, furent antagonistes. Voilà pourquoi « je suis de nulle part », comme le chantait Véronique Sanson.

Je sais que pour beaucoup de gens, avoir des racines est très important. Si j’étais au pouvoir, je favoriserais cet attachement à un terroir; mais pour moi, cela ne signifie rien: je me sens bien partout, du moment que je suis au-dessus de la Loire. Jeune, j’allais chez un correspondant en Angleterre, dans le Devon. À mes yeux, le Devon était un paradis.

Je rêvais également de l’Écosse. Il fallut attendre 2021 pour que je m’y rende dans le cadre de ma fuite. J’ai alors compris que mon intuition ne m’avait pas trompé: j’aime l’Écosse, je m’y sens presque chez moi. Pourquoi? Je l’ignore.

Toutefois, cette absence de terre natale m’aide profondément dans ma mission de révisionniste. En effet, comme vous le pressentez, si je me sentais loin de chez moi, isolé parmi des étrangers, ma situation serait « difficile à supporter ». Cependant, il n’en est rien, et si je suis remis en liberté, c’est avec immense plaisir que je resterais dans le nord de la Grande-Bretagne.

Aujourd’hui, la guerre idéologique continue. En tant que combattant national-socialiste, je dois être réduit au silence.

Vous écrivez: « être emprisonné pour des raisons idéologiques me parait d’un autre temps. » En effet, c’est d’un autre temps… sauf pour le national-socialisme, car le national-socialisme est la solution la plus adéquate aux problèmes sociaux qui se posent à l’Occident miné par le libéralisme. L’expérience allemande, avec Adolf Hitler, l’a démontré concrètement. Certes, tout n’était pas parfait au sein du IIIe Reich, mais ses réalisations sociales stupéfiantes sont indéniables.

Les libéraux l’avaient compris. Voilà pourquoi, dès le début, ils ont entrepris une croisade idéologique contre l’hitlérisme. Cette croisade d’extermination a connu un épisode armé entre 1939 et 1945. Le IIIe Reich fut physiquement laminé. Toutefois, la guerre idéologique a continué: son premier développement fut le grand procès de Nuremberg, dont Maurice Bardèche avait parfaitement deviné les implications profondes.

Aujourd’hui, la guerre idéologique continue. En tant que combattant national-socialiste, je dois être réduit au silence. Mon incarcération le permet — devrait le permettre. Ainsi, lorsqu’il s’agit de moi, l’emprisonnement pour des raisons idéologiques n’est pas « d’un autre temps ».

Mes adversaires y tiennent d’autant plus que malgré mon parti pris idéologique, je diffuse des vérités historiques. En effet, je l’ai dit face aux juges: je veux « réhabiliter le national-socialisme [allemand] dans ce qu’il a de réhabilitable. »

Autrement dit: si mes recherches historiques me conduisent à découvrir des faits avec lesquels je suis en désaccord, je ne tente pas de les déformer. Je les explique, sans pour autant les approuver. Mon livre Pourquoi Hitler était-il antisémite ? le démontre: j’explique l’antijudaïsme du Führer sans pour autant — c’est connu — être moi-même hostile aux Juifs. D’ailleurs, je n’ai jamais fait de l’antijudaïsme un élément essentiel du national-socialisme.

Ne confondant pas le national-socialisme et l’hitlérisme, je ne cherche pas à réhabiliter tous les aspects historiques du IIIe Reich.

À mes yeux, ce corpus idéologique repose sur quatre piliers: la primauté du Bien commun, la justice sociale, la protection de la nation comme entité naturelle, et la préservation de la race en tant que support biologique de l’âme du peuple. Si, au sein du pays, des Juifs ou des associations juives s’opposent à l’un de ces quatre objectifs, alors ils devront être combattus. Voilà tout.

Ne confondant pas le national-socialisme et l’hitlérisme (celui-ci étant une manifestation de celui-là dans un pays donné à une époque donnée), je ne cherche pas à réhabiliter tous les aspects historiques du IIIe Reich. En effet, l’application concrète d’une doctrine n’est jamais parfaite. L’esprit du peuple et, surtout, les circonstances peuvent provoquer des excès regrettables (bien qu’explicables).

Quand on connaît les circonstances dans lesquelles Hitler est arrivé au pouvoir, on reste ébahi face à la douceur de la révolution national-socialiste en Allemagne, surtout si on la compare à la Révolution française, à la révolution d’Octobre en Russie, ou à la révolution hongroise de Bella Kun.

Étranger à l’envie de tout réhabiliter au sein du IIIe Reich, je ne le défends que là où il est défendable, donc j’expose uniquement des vérités historiques qui dérangent mes adversaires. Mon dernier livre sur Oradour en fournit un exemple flagrant. Si, dans ce village, des Waffen SS avaient réellement massacré la population, alors je les condamnerais et ne tenterais pas de bâtir une thèse bancale pour prétendre nier l’indéniable.

Toutefois, les Waffen SS n’ont pas massacré les femmes et les enfants dans l’église: les constats matériels le démontrent surabondamment. Ils fondent mes conclusions, que cela plaise ou non. Voilà pourquoi j’adopte un autre point de vue que le vôtre quand vous écrivez: « même si je crois que votre travail est plus animé par un but idéologique — une volonté de réhabiliter le national-socialisme — que par un réel souci de vérité historique, il est injuste que vous soyez mis en cage.

Sachant que je le réhabilite en exprimant des vérités historiques qui dérangent, alors il est fatal que, dans la guerre idéologique qui continue, je sois « mis en cage ». Cela fait partie de la lutte. L’adversaire doit être neutralisé. S’il est impossible d’y parvenir en le réfutant, il faut tenter de le faire taire. C’est de bonne guerre. Certes, je me défends: après avoir fui en Angleterre, je me suis caché en Écosse. Et aujourd’hui, je m’oppose à mon extradition, aidé par un avocat qui défend la liberté d’expression. Là aussi, c’est de bonne guerre.

Nos sociétés « démocratiques » étant en guerre perpétuelle contre les « fascismes », il en résulte une « standardisation des esprits ».

En revanche, je vous approuve totalement lorsque vous écrivez: « Au-delà du révisionnisme, il s’installe à tous les niveaux de la société, une morale, une bien-pensance, une standardisation des esprits qui m’inquiète. Jour après jour, la prophétie orwellienne semble se réaliser. »

Elle se réalise pour une simple raison: dans le roman de Georges Orwell 1984, le monde est séparé en deux camps qui se combattent physiquement pour des motifs idéologiques (vrais ou faux, peu importe). Or, dans une guerre totale, toutes les forces doivent être concentrées par souci d’efficacité.

Physiquement, cela implique des armées au matériel standardisé afin d’être produit le plus nombreusement possible et le plus rapidement possible. Intellectuellement, cela conduit à un peuple aux idées standardisées, dans une société où toute déviance idéologique est considérée comme une trahison, un danger à supprimer.

Orwell le décrit fort bien, lorsqu’il raconte que les citoyens sont entraînés à interrompre toute « mauvaise pensée ». Son roman était prophétique: nos sociétés « démocratiques » étant en guerre perpétuelle contre les « fascismes », il en résulte une « standardisation des esprits » que vous dénoncez et qui vous inquiète à juste titre. Chaque citoyen devant être un petit soldat de la cause démocratique, il doit obéir à toutes les « valeurs » de la démocratie mondialiste. D’où un embrigadement dès l’école.

« Ils savent qu’on leur ment et ils veulent y voir une fatalité, voire la condition du maintien de leur vision hédoniste de la vie. »

La République fabrique des antifascistes. Son discours est simple: « pour enregistrer quelques avancées sociales, le fascisme supprime les libertés individuelles, enferme les opposants et fanatise les foules. La démocratie vous protège de tout cela et garantit vos libertés individuelles. » Malgré tous les dysfonctionnements du système et malgré une absence totale de vue d’avenir, les électeurs plébiscitent la démocratie, parce que pour la plupart de nos concitoyens, la vie n’a aucun sens.

Pour eux, l’Homme n’est qu’une machine biologique évoluée, issue de mutations aléatoires dues à des lois physiques aveugles. La vie commence lorsqu’un spermatozoïde féconde un ovule, et s’achève quand le cerveau s’éteint. Sorti du néant, l’être s’anéantit alors. Par conséquent, il faut donc profiter des quelques décennies d’existence avant la décrépitude et la mort.

Tel est, pour l’immense majorité, le seul horizon. Il se borne à la sphère privée: « je veux une vie confortable, assurée et tranquille; la république me l’assure, donc je la soutiens. » Pour cette masse de citoyens, la standardisation des idées — qui inclus l’acceptation des mensonges — le prix à payer pour cette petite vie tranquille. Un ami philosophe m’a écrit:

Votre cause, qui est nôtre, semble perdue à vue d’homme, pour des raisons […] qui, au-delà de toutes les théories conspirationnistes, résident essentiellement dans le consentement des peuples au mensonge et à la décadence. Ils savent qu’on leur ment et ils veulent y voir une fatalité, voire la condition du maintien de leur vision hédoniste de la vie.

Jean-Jacques Sormay

Cette réalité, je n’ai cessé de la constater au sein de ma famille: composée de bourgeois politiquement corrects, personne ne m’a ni lu ni écouté (que ce soit grâce à l’une de mes vidéos ou lors d’une conversation privée).

Un jour, j’ai présenté à l’un de mes oncles mon premier livre sur le drame d’Oradour. Il l’a feuilleté, puis me l’a rendu en disant: « oui… bon… mais les SS restent des criminels. » La vérité historique? Il l’a refusait. Tout ce qu’il souhaitait, c’était conserver ses certitudes idéologiques, à commencer par son soutien au Système.

« Les malheurs de notre pays leur offrent de plus sûrs motifs d’indignation, ils se délectent, secrètement, de cette situation qu’ils décrètent définitivement sans espoir pour justifier en retour leur inaction. »

Certes, au sein de nos sociétés, une dissidence existe, parfois bruyante; mais concrètement, que fait-elle? À part dénoncer, bien peu en vérité. En particulier, j’ai toujours noté chez les dissidents l’absence de projet de société.

Sur les forums de discussion, la plupart des participants semblent s’imaginer qu’il suffirait de renvoyer les immigrés chez eux, d’expulser les Juifs, de fermer les loges maçonniques et d’organiser un « grand soir » pour que tout rentre dans l’ordre, à condition de préserver la race ou de rétablir la royauté sociale du Christ, c’est selon.

Ces gens ne se sont jamais interrogés sur l’origine réelle de la décadence: la plupart du temps, ils croient la découvrir dans de prétendus complots maçonniques ou juifs. Je ne nie pas l’existence de conspirations (c’est-à-dire d’ententes secrètes, afin d’agir sur la société); j’affirme en revanche que pour être couronnée de succès, une conspiration doit se développer sur un terrain favorable, c’est-à-dire au sein d’une société déjà malade.

Ce n’est donc pas la conspiration qu’il faut dénoncer, mais la maladie qu’il faut découvrir, afin d’en identifier les causes pour ensuite les corriger. La question primordiale est: « Pourquoi cette vision matérialiste de l’Homme a-t-elle pu triompher? »

Hélas, au lieu d’y réfléchir sérieusement, la plupart des membres de la dissidence lancent: « c’est à cause des juifs/maçons/mondialistes/que-sais-je… », puis ils passent des heures à les dénoncer en s’appuyant sur des faits divers (à dénoncer anonymement, bien cachés derrière un pseudonyme, mais sans agir concrètement, du moins sans mener les combats essentiels).

Longtemps, je me suis interrogé sur cette façon d’agir qui, au fil des années, a démontré son inefficacité. Voilà peu, un jeune correspondant m’a apporté la réponse. Il désigne un mal « hélas trop répandu dans nos milieux: le plaisir de l’indignation ».

Au fond, la présence de l’immigré, la montée en puissance de groupes de pression idéologiques prouvant la décadence leur plaît. L’ancien monde, celui de leur enfance a disparu et ils ont été précipités dans un abîme de nihilisme, avec le reste de la société. Pour échapper au vide existentiel qui les ronge au même titre que leurs compatriotes de gauche, ils s’opposent, ils cherchent à exister en livrant des combats faciles consistant à blâmer l’autre, à s’émouvoir de la déliquescence de la France. Mais ils ne font que jouir de la destruction. Les malheurs de notre pays leur offrent de plus sûrs motifs d’indignation, ils se délectent, secrètement, de cette situation qu’ils décrètent définitivement sans espoir pour justifier en retour leur inaction.

Je partage cette analyse. Pour beaucoup, l’indignation perpétuelle est une distraction qui permet de fuir leur vide intérieur. Sachant que leur action est vaine, ces indignés perpétuels donnent le change avec des discours violents, des caricatures obscènes et des promesses de « grand soir » au terme d’une guerre civile.

« Rejeter la faute sur les autres est bien trop facile, c’est se mettre dans une posture confortable, se dédouaner de toutes responsabilités. »

De mon côté, je n’ai nulle envie de manier l’outrance. Je me présente comme un national-socialiste apaisé (le « gentil nazi » du Meta Show, ép. 3) et je me contente d’exposer ce que je crois être la vérité. De plus, j’encourage les auditeurs à cesser de blâmer l’autre pour rechercher plutôt nos propres responsabilités dans la décadence. Mes discours ne véhiculent donc aucune haine.

Vous le soulignez en écrivant: « Ceux qui vous accusent d’appeler à la haine, d’encourager à la violence, ceux-là n’ont rien compris à vos propos. Au contraire, vous m’avez plutôt adouci, convaincu que nos maux n’étaient absolument pas la faute des Juifs, mais que nous étions nous-mêmes responsables de nos propres malheurs. Et pour cela, je vous remercie. Rejeter la faute sur les autres est bien trop facile, c’est se mettre dans une posture confortable, se dédouaner de toutes responsabilités et cela, vous l’avez bien compris. »

Au sein de nos milieux, mes positions ne sont guère appréciées. Certains m’accusent même de faire le jeu de nos adversaires en rejetant la faute sur le peuple français: « Vous ne cessez d’exonérer les Juifs, » me lance-t-on parfois. Ma réponse consiste à rappeler la réalité: à l’heure actuelle, je suis sans doute le dissident le plus traqué et le plus frappé.

J’écris cette lettre dans une cellule de la prison d’Édimbourg, à l’heure où les autorités françaises déploient tous leurs efforts pour obtenir mon extradition.

Nos adversaires font tout pour me faire taire: ils lancent un mandat d’arrêt pour une vidéo vieille de huit ans et ils me font arrêter par le contre-terrorisme britannique dans un petit hameau écossais où je m’étais caché sous un faux nom. C’est la preuve que mon action est utile, sans quoi on me laisserait prêcher dans le désert.

J’écris cette lettre dans une cellule de la prison d’Édimbourg, à l’heure où les autorités françaises déploient tous leurs efforts pour obtenir mon extradition. Je pourrais me taire, courber l’échine et promettre de changer; mais non, je continue à clamer la vérité haut et fort.

Vous commentez: « Votre dévotion à la cause témoigne d’un esprit de sacrifice qui manque cruellement aux hommes de notre temps. » Pour ma part, je ne crois pas que ce manque d’esprit de sacrifice soit cruel. Il est dans l’ordre des choses: à quoi servirait-il que des dizaines de personnes se sacrifient pour la vérité puisque, nous l’avons vu, le peuple préfère les mensonges officiels?

Mon ami philosophe ajoute à ce constat: « Contre une telle démission [du peuple], personne ne peut faire grand-chose, sinon entretenir la braise pour que le feu reprenne quand les temps seront mûrs. » Or, pour entretenir la braise, un ou deux sacrifiés suffisent, de génération en génération.

Voilà pourquoi je rassure toujours ceux qui se lamentent ou qui s’excusent de ne pas avoir mon « courage ». Invariablement, je leur réponds que personne ne leur demande de monter en première ligne. Ce serait inutile. En revanche, je pense qu’au sein de nos milieux, la réflexion devrait s’organiser autour de deux questions connexes:

  1. Pourquoi l’image matérialiste de l’Homme a-t-elle triomphé?
  2. Par quoi faut-il la remplacer?

Dans une lettre publique en réponse à un jeune nationaliste qui sera publié ultérieurement, j’apporterai mes pistes, issues de nombreuses années d’observations, de lecture et de réflexions.

[…]

Vincent