Le 11 février, Robert Hébras est mort à l’âge de 97 ans. Le 10 juin 1944 à Oradour, il avait survécu à la fusillade des hommes par les Waffen SS. Après la disparition, en 1983, de la femme présentée comme l’unique rescapée du drame de l’église, Marguerite Rouffanche, il était devenu le «témoin vedette». Jusqu’au bout, il fut un militant actif de la «Memoire».
Je n’ai aucune raison de me réjouir de son décès. Quand on prend de la hauteur, il n’ y a plus ni allié ni ennemi; il n’ y a que des individus qui, volontairement ou non, servent les desseins de la Providence. Aujourd’hui, je remercie Robert Hébras pour les services qu’il a rendus malgré lui à la cause du révisionnisme historique. En effet, le dernier « témoin vedette » fut un menteur très maladroit, on pourrait même le qualifier de gaffeur.
Lors de ma première venue à Oradour, en août 1990, j’ai interrogé Robert Hébras. Il m’a raconté sa fuite hors de la grange Laudy où, avec quelques dizaines d’autres, les Waffen SS l’avaient parqué. Puis, je l’ai questionné sur le saut de Mme Rouffanche à travers le vitrail central de la façade est de l’église. Comment une femme de 46 ans, sans entraînement physique, avait-elle pu chuter d’une hauteur d’environ quatre mètres sans s’occasionner la moindre blessure?
Plus incroyable encore: comment n’avait-elle pas dévalé le plan fortement incliné qui se trouvait sous le vitrail, pour tomber 2,5 m plus bas dans la rue où, dit-on, un Waffen SS était posté? Robert Hébras invoqua la présence d’un épais roncier qui, sous le vitrail, aurait amorti et interrompu sa chute.
Or, non seulement Mme Rouffanche n’en avait jamais parlé, mais de plus, les clichés pris peu après le drame attestaient l’absence de ce prétendu roncier. La pente sous le vitrail était recouverte d’une fine couche d’herbe. Pas de quoi amortir ni interrompre une chute de quatre mètres. Le mensonge proféré par Robert Hébras me convainquit que le témoignage de Mme Rouffanche était faux: il avait été bâti dans l’urgence, et les réalités du terrain le démentaient.
Après la parution de mon premier livre en 1997, les gardiens de la Mémoire s’enfoncèrent davantage dans le mensonge: le guide expliqua qu’un buisson haut de 4 m avait caché Mme Rouffanche lorsqu’elle se tenait en équilibre à la fenêtre, puis avait interrompu sa chute au cours de laquelle elle s’était évanouie. L’épais roncier était donc devenu un énorme « buisson », et l’unique rescapée s’était prétendument évanouie alors qu’elle ne l’avait jamais dit! Passons sur ces tentatives pitoyables de sauver un récit incroyable, car démenti per les constats matériels.
En 1992, Robert Hébras publia une brochure intitulée: Oradour, le drame heure par heure (Montreuil-Bellay, 1992: Éditions C.M.D.). J’y découvris deux mensonges graves et une gaffe qui allaient conforter mes doutes à propos de toute cette histoire racontée depuis 1944.
La gaffe concerne encore le témoignage de Mme Rouffanche. Pour bien comprendre son importance, une précision s’impose. La tragédie d’Oradour survint à 16 heures, lorsque le dépôt clandestin de munitions aménagé sous les combles de l’église sauta. L’événement provoqua la mort des femmes et des enfants qui avaient été parqués dans le lieu saint, ainsi que la fusillade des hommes: les Waffen SS ayant cru en une attaque des maquis environnants, ils avaient mitraillé les hommes pour ne pas être agressés de tous les côtés.
Afin de cacher l’origine réelle de drame effroyable, les fabricateurs de la thèse officielle finirent par bâtir la chronologie suivante: vers 16h, un Waffen SS (le capitaine Kahn) tire avec son arme pour ordonner la fusillade des hommes. Puis, les meurtriers recouvrent les corps de combustibles divers avant d’y mettre le feu. Cette besogne achevée, vers 17 heures, ils se rendent à l’église pour y massacrer les femmes et les enfants.
Toutefois, dans son témoignage officiel, Mme Rouffanche déclare que « vers 16 heures », deux Waffen SS apportèrent une « caisse » dans l’église. L’engin ayant été mis à feu, une « forte explosion » se produisit et une fumée noire se dégagea. Rien, dans son récit, ne laisse supposer que pendant une heure (de 16h à 17h) la « caisse » aurait été laissée là, sans que rien ne se produise.
Au contraire, le dépôt, l’allumage et l’explosion surviennent à la suite, sans interruption. D’ailleurs, Mme Rouffanche n’a jamais évoqué des bruits de fusillades qui auraient été entendus de l’église. Elle parle uniquement de « préparatifs auxquels nous assistions ». Or, gageons que si les gens dans l’église avaient entendu des mitraillades, ils se seraient inquiétés et l’unique rescapée l’aurait rapporté. Son récit dément donc la chronologie officielle élaborée maladroitement.
Dans son opuscule sur le drame d’Oradour, Robert Hébras, conscient du problème, interrompt la citation du témoignage de Mme Rouffanche et écrit: « Entre 16 et 17 heures [les femmes et les enfants] ont dû vivre un calvaire effroyable, car le vacarme intense des tires, des explosions, de l’incendie leur parvenait sans doute. Qu’ont-ils pu penser? » Voilà comment le « témoin vedette » gomme une contradiction flagrante: il complète le récit de Mme Rouffanche pour y ajouter un élément essentiel qui, si la thèse officielle était exacte, aurait dû nécessairement s’y trouver. Quelle gaffe!
La manipulation des témoignages est la méthode utilisée par Robert Hébras. Toujours dans sa brochure, Robert Hébras précise qu’à l’arrivée des Waffen SS, un ami, Martial, prit peur et partit se cacher. Il aurait tenté de le rassurer en arguant l’absence de danger, et le maire aurait ri en voyant fuir Martial. Toutefois, m’étant procuré les comptes rendus sténographiques du procès des Waffen SS d’Oradour, je disposais du témoignage complet de Robert Hébras.
À l’audience, fin janvier 1953, il raconta qu’à l’arrivée des Waffen SS, il avait quitté son camarade pour rentrer chez lui. Ses paroles rassurantes et l’épisode du maire ne figurent nulle part. J’en déduis que 39 ans après, le « témoin vedette » inventa des faits, afin de présenter Oradour comme un village parfaitement tranquille, sans aucune activité de résistance, et où personne n’aurait eu à craindre l’arrivée de Waffen SS — personne, sauf exception irrationnelle. Robert Hébras savait en effet que peu après le drame, des récits avaient circulé, évoquant de nombreux fuyards et, surtout, des femmes en pleurs ou qui s’évanouissaient au moment d’être séparées des hommes. Ces récits heurtaient de front la thèse du bourg tranquille où chacun se serait occupé uniquement de sa terre ou de son commerce (dixit Jean-Marcel Darthout, autre rescapé).
Toutefois, dans sa volonté de défendre mordicus l’histoire officielle, le « témoin vedette » est allé trop loin. Toujours dans sa brochure, il rappelle qu’une fois la population regroupée sur la place du village (le champ de Foire), les Waffen SS pointèrent sur les villageois des mitrailleuses lourdes. Et comment prétend-il avoir réagi? En se glissant parmi la foule pour rejoindre des copains et discuter avec eux… de la partie de football prévue le lendemain!
Imaginez la scène: en pleine Occupation, dans une région en ébullition à la suite des derniers événements militaires (nous sommes quatre jours après le débarquement en Normandie), une centaine de soldats armés investissent le bourg, font sortir brutalement la population des maisons, y compris les femmes et les enfants, parquent les gens sur la place du village avec des mitrailleuses lourdes pointées sur eux. Déjà, quelques coups de feu ont retenti; mais à quoi pensent ces jeunes gens? Quel est leur seul objet de préoccupation face à ce déploiement de force? Le match de football du lendemain! C’est déjà incroyable.
Cependant, Robert Hébras va plus loin. En effet, l’affaire se complique et les hommes sont parqués dans les granges avec, face à eux, des soldats prêts à tirer. Que fait-il? Avec quelques copains, il poursuit sa conversation sur la rencontre sportive du lendemain, car l’équipe adverse risquait de « donner du fil à retordre ». À trop vouloir prouver qu’Oradour aurait été un village tranquille, le « témoin vedette » se trahit en perdant le sens de la réalité. Ses souvenirs créés de toutes pièces sont contraires à la psychologie la plus évidente.
Toutefois, habitué à ne rencontrer aucune critique de la part des historiens, Robert Hébras en est devenu trop sûr de lui. Plus loin dans sa brochure, il rappelle un épisode authentique: le soir du drame, les Waffen SS arrêtèrent des habitants d’Oradour, qui, ayant passé la journée à Limoges, revenaient par le tramway de 19h. Il ajoute qu’un moment de les relâcher, un soldat aurait lancé: « On vous laisse partir! Vous pouvez dire que vous avez de Lachance, car nous les avons tous massacrés. » Malheureusement pour le « témoin vedette », je connais cet épisode raconté par un témoin oculaire. Ce dernier a rapporté ainsi les propos du Waffen SS: « On vous laisse partir. Vous pouvez dire que vous avez de la chance. » Robert Hébras a simplement falsifié ce témoignage, afin d’y ajouter un « aveu », le soir même, d’un Waffen SS.
Dès 1997, j’ai dénoncé publiquement les tricheries éhontées du « témoin vedette ». Non seulement il ne m’a pas répondu, mais de plus, lors de mon procès à Limoges, en 2003, il n’a pas osé comparaître comme témoin de l’Accusation. Celle-ci convoqua un comparse de moindre importance, Jean-Marcel Darthout qui reprit, sans le dire, les mensonges de Robert Hébras. Sans l’obstruction du Tribunal, je l’aurais coincé, tout comme j’aurais coincé le « témoin vedette ». Les lecteurs intéressés se reporteront à mon dernier ouvrage consacré à la tragédie.
Entre 2012 et 2020, par deux fois, j’ai accusé publiquement Robert Hébras de mensonge, l’invitant à porter plainte contre moi pour diffamation. Il s’en abstint. Celui-ci disparu, sa petit-fille a promis de reprendre le flambeau de la « Mémoire ».
En 2021, dans une vidéo publique, je l’ai invitée à un débat loyal. Elle n’a pas répondu, tout comme à l’heure actuelle, les gardiens de la Mémoire dressent un mur du silence autour de mon dernier ouvrage: Oradour-sur-Glane, le cri des victimes (Londres, 2022: Sans Concession). Je les comprends: le dossier d’Oradour est tellement pourri qu’un débat loyal serait dévastateur pour eux. Aussi préfèrent-ils soit rester silencieux, soit recouvrir aux tribunaux, c’est-à-dire au débat déloyal, comme à Limoges, en 2003 et en 2004.
J’ai achevé mon livre sur Oradour début novembre 2022, alors que j’étais en fuite, caché dans un petit hameau écossais, car recherché par la police britannique sur initiative de la France. J’écris cet article à la prison d’Édimbourg, après avoir été retrouvé et arrêté le 10 novembre par les services du contre-terrorisme. Qu’importe: les gardiens de la Mémoire n’ont pu empêcher la parution du livre.
J’ai accompli ma mission de semer des graines de vérité. Germeront-elles? Je n’en sais rien, mais j’ai confiance. Dans ma cellule, j’entends encore cette jeune adolescente qui, visitant l’église d’Oradour en 1999, lança à ses parents: « Mais… pourquoi le confessionnal n’a pas brûlé? » Contrairement à une opinion courante dans nos milieux, les gens savent réfléchir. Voilà pourquoi je dors en paix. L’histoire officielle du drame d’Oradour est condamnée. Intellectuellement, j’ai déjà remporté la victoire.
Certes, je suis en prison; mais dans cette affaire, mon destin personnel n’a aucune importance: les barreaux retiennent les corps, pas les thèses. La vérité historique triomphera donc. J’ajoute que mon emprisonnement favorisera son triomphe, car si mes travaux étaient insignifiants, alors les autorités françaises ne me traiteraient pas de la sorte; elles me laisseraient prêcher dans le désert. Or, elle me traqua jusqu’au fin fond de l’Écosse, alors que je vivais dans une petite chambre loin de tout.
L’acharnement dont je suis l’objet démontre la valeur et l’importance de mes travaux. Je remercie donc aussi mes persécuteurs qui, contemplés de haut, se révèlent être des alliés de la vérité historique. Oui, vraiment, tout sert les desseins de la Providence. Voilà pourquoi dans ma cellule, je suis serein, joyeux, souriant tous les jours avec tout le monde. Merci à celles et ceux qui m’accompagnent dans cette aventure merveilleuse qu’est le révisionnisme historique.