Sous ma dernière publication, un internaute commente: « Je ne crois pas au révisionnisme, mais la liberté d’expression doit être sacrée. La seule limite doit être la conséquence de ses déclarations si violence en découle. »
Je comprends, cher Internaute, votre position. Toutefois, vous oubliez que nous sommes dans une société qui pratique le principe de précaution: « Mieux vaut prévenir que guérir. »
En matière de Justice, ce principe se traduit ainsi: la violence découle aussi de la haine; par conséquent, pour prévenir cette violence, agissons en amont et sanctionnons les discours que nous jugeons susceptibles de provoquer à la haine.
L’adjectif « susceptible » est capital. Il n’est pas besoin que le discours jugé appelle explicitement à la haine. C’est le magistrat lui-même qui décide. En 1993, un avocat, Eric Delcroix, avait constaté:
Il importe peu que le journaliste [ou l’écrivain, l’orateur, etc.] ait eu ou non l’intention de provoquer à la haine. On ne s’interroge pas sur la question de sa bonne foi. Mais des juges glossateurs apprécient souverainement que l’écrit qui leur est soumis ‘ne peut que susciter’ ou est ‘susceptible de susciter’, ici un tiers sentiment (la peur [le ressentiment, le mépris, etc.]) ‘de nature à provoquer à la haine’1.
Il en résulte la notion de « liberté d’expression encadrée ». Le 12 février 2015, commentant sur France-3 ma condamnation à deux ans de prison ferme pour « négationnisme », l’avocat de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, Marc François, déclara:
La liberté d’expression, elle est encadrée, précisément pour qu’on n’en fasse pas n’importe quoi et pour que des propos n’aient pas des conséquences néfastes sur les piliers de la démocratie. Et on ne peut pas, simplement parce qu’on est libre, soi-disant, de dire ce qu’on veut, de proférer des propos qui véhiculent de l’antisémitisme, de la haine, de la négation des crimes contre l’humanité.
Notez que l’avocat ne citait aucune « conséquence néfaste » de mes propos dans la société. En particulier, il ne pouvait mentionner aucun acte violent qui aurait été commis par un individu se réclamant de mes discours.
Mais qu’importe, car le 11 juin 1990 au Sénat, le garde des Sceaux Pierre Arpaillange avait justifié ainsi le vote de la loi dite anti-négationniste:
Je pense, pour ma part, que, si la révision de l’Histoire est toujours un droit, souvent un devoir, la négation de l’Holocauste par les auteurs qui se qualifient, selon un terme inapproprié, ‘révisionnistes’ n’est, aujourd’hui, qu’une expression du racisme et le principal vecteur contemporain de l’antisémitisme2.
Le « négationnisme » étant vu comme un discours intrinsèquement « raciste » et « antisémite », il était jugé susceptible de provoquer à la haine. Par conséquent, les discours « négationnistes » devraient être sanctionnés par la loi. D’où la promulgation de la loi anti-négationniste le 13 juillet 1990, une loi qui permit, entre autres, ma condamnation, en février 2015, à deux ans de prison ferme.
En Appel, les magistrats confirmèrent cette condamnation tout en ramenant la peine à un an de prison ferme (c’était le maximum prévu par la loi). Dans leur arrêt, ils justifièrent cette sévérité en déclarant: « les théories développées par le prévenu sont de nature […] à influencer une partie fragile de la population au point de la conduire à la commission d’actes antisémites ou racistes3« .
Je n’invoque jamais le droit à la liberté d’expression; en revanche, j’invoque le devoir de défendre publiquement la vérité.
Voilà pourquoi, cher Internaute, votre discours sur la liberté d’expression reste inopérant. Car on vous répondra: « Bien sûr que la liberté d’expression est sacrée. Bien sûr que sa seule limite est la violence qui peut découler des propos tenus. Mais sachant qu’il vaut mieux prévenir que guérir, alors nous encadrons la liberté d’expression en sanctionnant les propos de nature à susciter la haine, source possible de violence. »
Contrairement à vous, je ne crois pas au caractère sacré de la liberté d’expression, car chaque société repose sur des croyances (religieuses, historiques, scientistes…) dont elle sanctionnera, légalement ou non, la remise en cause. Mais, toujours contrairement à vous, je crois au révisionnisme.
Voilà pourquoi, y compris face aux juges, je n’invoque jamais le droit à la liberté d’expression; en revanche, j’invoque le devoir de défendre publiquement la vérité, à commencer par la vérité historique.
Ce devoir révisionniste, je l’accomplis dans ma vie, sans perdre mon temps à pleurnicher au motif qu’on me refuse la liberté d’expression. Bien au contraire, à mon dernier procès, j’ai lancé au Tribunal: « je viole la loi Gayssot, je le sais, et je ne demande aucune mansuétude de votre part. » Mon précédent message explique pourquoi…
Dernière remarque. Si je fuis la Justice, mes adversaires me traitent de lâche. Si j’y fais face, ils me présentent comme un raté qui, pour exister, cherche la reconnaissance par le « martyr ». Bref, dans un cas comme dans l’autre, j’ai tort. À mes yeux, cette façon de raisonner est une preuve de mauvaise foi.
- Eric Delcroix, La Francophobie, éd. Libres Opinions, p. 54 ↩︎
- Journal officiel, Sénat, 12 juin 1990, p.1447 ↩︎
- Cour d’Appel de Caen, Arrêt du 17 juin 2015, n°15/00399, p.8 ↩︎









