Une nouvelle loi « antiraciste »: la folie répressive s’aggrave

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Dans cet article, Vincent Reynouard analyse la proposition de loi visant à renforcer la répression des propos jugés politiquement incorrects, récemment adoptée par l’Assemblée nationale. Répression des propos non publics, mandats d’arrêt, appel non suspensif de la peine: la folie répressive s’aggrave.


Le 6 mars, l’Assemblée nationale a adopté une « proposition de loi visant à renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste, antisémite ou discriminatoire ». Elle devrait s’ajouter à l’arsenal déjà impressionnant des textes de ce type: lois Pleven (1972), Gayssot (1990), Perben I (2003) et Perben II (2004). Lois du 30 décembre 2004 (création de la « la haute autorité de lutte contre les discriminations ») et du 27 janvier 2017 (lutte contre la « transphobie » et extension de la loi Gayssot à certains crimes de guerre comme le massacre d’Oradour-sur-Glane).

Répression des propos non publics

Le texte voté le 6 mars illustre l’aggravation de la répression. Jusqu’en 2016 par exemple, les « diffamations et injures non publiques » à caractère « raciste » étaient punies d’une contravention de la quatrième classe (750 euros). La loi du 27 janvier 2017 élargit ces infractions aux propos tenus « en raison de l’identité de genre de la victime ».

De plus, les propos jugés discriminatoires seraient désormais punis d’une contravention de cinquième classe (1 500 euros d’amende). Avec le projet de loi adopté le 6 mars, les « provocations, diffamations et injures non publiques à caractère discriminatoire, deviennent des délits punis de 3 750 euros d’amende ».

Soral, Ryssen, Le Lay, Dieudonné et Reynouard nommément visés

Mais les cibles principales de nos gouvernants restent les idéologues qui s’expriment via internet. Les rédacteurs de la loi s’offusquent:

L’odieux Soral, condamné à de multiples reprises […] ne dort toujours pas en prison et continue de déverser sa haine aussi insupportable que lucrative 1.

Pointant les « phénomènes particulièrement insupportables facilités par internet », le rapporteur, Mathieu Lefèvre, déclare:

des prédicateurs de haine […] y déversent des théories complotistes à grand renfort de révisionnisme, d’apologie de crimes ou de délits, d’injures ou de provocations à la haine. Alain Soral, Hervé Ryssen, Vincent Reynouard, Boris Le Lay ou Dieudonné M’Bala M’Bala en sont autant d’exemples.

Votre rapporteur assume de citer leurs noms tout en dénonçant leurs méfaits, car il faut porter à la connaissance de tous le danger qu’ils représentent2.

Et la députée Caroline Yadan de préciser:

Concrètement, l’enjeu de cette proposition de loi est de pouvoir sanctionner les idéologues qui sévissent notamment sur les réseaux sociaux sur internet — ces multirécidivistes qui sont rarement présents à leurs audiences et vivent à l’étranger pour échapper à leur condamnation, comme les sieurs Ryssen, Reynouard, Le Lay ou encore M’bala M’bala, pour ne citer que les plus sinistres d’entre eux3.

Mandats d’arrêt et de dépôt

Pour s’en saisir, la loi innove. Eric Martineau déclare:

Désormais, et c’est heureux, le tribunal correctionnel pourra délivrer un mandat d’arrêt ou de dépôt en cas d’apologie de crimes et de contestation de crimes contre l’humanité4.

Le rapport précise:

Cette réponse plus directe mettrait ainsi un coup d’arrêt immédiat à la diffusion des discours de haine de ces individus, nuisant à leur commerce […]

Dans le cas d’individus qui vivent souvent reclus ou cachés, parfois à l’étranger, la possibilité d’émettre un mandat d’arrêt apparaît indispensable5.

On ne saurait être plus clair: le mandat d’arrêt permettra de traquer activement les diffuseurs des thèses révisionnistes qui tenteront d’échapper à la justice en s’exilant ou en se cachant.

Quant au mandat de dépôt, il permettra de les jeter en prison dès la condamnation en première instance6. Jusqu’à présent, en effet, l’appel et la cassation étaient suspensifs, ce qui pouvait permettre de gagner deux ou trois ans, avant d’être incarcéré. Ce répit deviendra impossible…

Certains objecteront que pour être émis, un mandat devra viser une personne condamnée à au moins une année d’emprisonnement, soit la peine maximale prévue par la loi Gayssot.

Sans doute, mais outre que cette peine est de plus en plus souvent prononcée, le rapport précise que le tribunal pourra « délivrer un mandat de dépôt ou d’arrêt, quelle que soit la peine d’emprisonnement prononcée lorsque les faits seront commis en état de récidive légale.7« 

Or, Soral, Dieudo, Ryssen, Le Lay, Bourbon et moi-même sommes des récidivistes. Par conséquent, les juges pourront toujours lancer des mandats contre nous, quelle que soit la peine prononcée.

Les propos révisionnistes non publics désormais sanctionnés

Mais une autre innovation de la loi se révèle plus grave. Le rapport annonce que pour « combler un manque qui affaiblissait jusqu’alors notre réponse pénale », « l’apologie et la contestation non publique de crimes contre l’humanité » seront désormais punissables. Le document précise:

Des faits graves, aujourd’hui non sanctionnés, pourront ainsi l’être demain, comme la contestation de l’existence de la Shoah dans le cadre d’une communauté d’intérêt, par exemple au sein d’une entreprise.

Votre rapporteur salue l’adoption de ce nouvel article qui renforcera la lutte implacable qu’il nous appartient de mener contre le racisme, et plus singulièrement l’antisémitisme8.

Pourront donc être poursuivis et condamnés ceux qui, lors d’une discussion privée entre collègues, voire entre amis (avec un intrus qui écoutait), auront soutenu les thèses révisionnistes.

L’objectif final est d’empêcher quiconque, en toute circonstance, de contester l’existence des chambres à gaz homicides allemandes.

À ceux qui m’accuseront d’exagérer, j’opposerai les propos du député Jérémie Patrier-Leitus qui déclare:

Il n’est aujourd’hui pas possible de retenir la contestation de crime contre l’humanité, faute de publicité, lorsqu’elle se manifeste par exemple sous la forme de lettres adressées à des professeurs, à des préfets, à des élus de la nation ou à des citoyens.

Le présent amendement vise à sanctionner plus justement ce type de comportements qui entretiennent un climat délétère et qui peuvent contribuer, entre autres, à diffuser les opinions négationnistes et à renforcer les différentes formes de discrimination, aggravant ainsi les fractures divisant déjà la société française9.

C’est clair: la diffusion du révisionnisme doit être empêchée totalement, y compris lorsqu’elle s’effectue par le bouche-à-oreille ou par le biais de lettres privées. Il faudra toujours se taire… Jérémie Patrier-Leitus s’en félicite:

Notre droit doit assumer une fermeté sans faille en la matière: même dans un cadre non public, de tels propos sont inacceptables. Nous ne pouvons accepter cette violence et en tolérer la banalisation. Je me réjouis des dispositions adoptées en commission des lois10.

Le sophisme des antiracistes

Le député assimile donc tout discours révisionniste à un acte de violence. Faut-il s’en étonner? Non, car cette aggravation de la répression se fonde sur le sophisme qui s’exprime ainsi: les thèses révisionnistes sèment la haine; or, la haine provoque, in fine, la violence; donc les discours révisionnistes doivent être réprimés.

Ce sophisme apparut nettement lors des discussions sur le projet de loi. Le rapport préliminaire rappelait:

Sur le fond, le Conseil constitutionnel a été amené à reconnaître la constitutionnalité de l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881, qui réprime la contestation des crimes contre l’humanité commis pendant la Seconde Guerre mondiale, dans des termes qui soulignent la gravité toute particulière de ce délit.

Il a en effet affirmé qu’ »en réprimant les propos contestant l’existence de tels crimes, le législateur a entendu sanctionner des propos qui incitent au racisme et à l’antisémitisme » et que « les propos contestant l’existence de faits commis durant la Seconde Guerre mondiale qualifiés de crimes contre l’humanité (…) constituent en eux-mêmes une incitation au racisme et à l’antisémitisme » 11.

À la tribune de l’Assemblée ensuite, le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti lança:

Fondés sur des idéologies mortifères, les paroles discriminantes et les discours de haine font […] le lit de passage à l’acte violent. En effet, après les mots, il y a les coups12.

D’où la répression orchestrée, afin de protéger non seulement les personnes, mais aussi la France, car « quand la France devient raciste, elle cesse d’être la France » disait le gaulliste René Capitant, cité dans le rapport de la loi.

On objectera sans doute que les discours purement révisionnistes n’ont jamais provoqué la moindre violence. Toutefois, Jérémie Patrier-Leitus explique que c’est sans importance:

Les discours de haine, qu’ils soient tenus en public ou en privé, constituent en réalité une première étape dans la brutalisation de la vie publique.

Ils tendent à banaliser une violence qui pourra ensuite être exprimée par un passage à l’acte, pour des délits plus graves ou pour des crimes.

Ils sont devenus désormais tellement répandus que l’on ne peut plus attendre que se produisent des atteintes graves à la personne pour prendre de véritables sanctions13.

Au nom, donc, du principe de précaution, ces gens prétendent justifier la répression antirévisionniste, et cela même si les exposés du professeur Faurisson n’ont jamais conduit quiconque à agresser des Juifs.

Une folie répressive qui ira encore plus loin

Pris dans leur logique folle, nos élus iront toujours plus loin. Certains l’annoncent d’ailleurs. Commentant le projet de loi du 6 mars, le député Éric Pauget déclara:

Durant les travaux en commission, nous avons adopté plusieurs amendements qui ont enrichi le texte. Ils créent notamment les délits d’apologie et de contestation non publiques de crimes contre l’humanité et des régimes de peines complémentaires envers les auteurs de discriminations non publiques.

Si ces avancées vont dans le bon sens, elles semblent cependant insuffisantes pour répondre aux exigences du rapporteur, qui appelle, comme chacun de nous, à une impunité zéro pour les prédicateurs de haine. C’est pourquoi les députés Les Républicains ont déposé plusieurs amendements en vue de réprimer plus fermement ces actes odieux.

Certains visent à créer des délits de provocation non publique à la négation ou à la destruction d’un État, ou à rendre inéligibles les dépositaires de l’autorité publique qui se rendraient coupables de racisme ou d’antisémitisme14.

Nous voilà donc prévenus: un jour viendra où les discours antisionistes tenus en privé pourront être sanctionnés d’amende et d’inéligibilité.

L’intolérance des tolérants

Les élus l’affirment ouvertement: ils veulent changer la société pour la rendre toujours plus répressive. Lors des discussions sur la loi du 6 mars, la députée Écolo-NUPES Sandra Regol lança:

Nous avons le devoir de changer la société, de mettre fin à la culture de la tolérance […] Il faut combattre la tolérance aux propos racistes et antisémites et à la haine de l’autre sous toutes ses formes15.

De son côté, Éric Dupond-Moretti s’exclama:

Je vois dans cette proposition de loi un message de détermination et, surtout, d’espoir — l’espoir que les générations futures ne tombent pas dans la xénophobie, le racisme, l’antisémitisme et la haine de l’autre, qu’elles soient, au contraire, fières des valeurs de la République et que les jeunes soient les fers de lance de notre lutte contre ces bas instincts.

En attendant que cet espoir devienne réalité, il est indispensable, impérieux, que la loi pénale rappelle avec force à tous que la haine est non pas une opinion, mais un délit16.

C’est limpide: le gouvernement embrigade la jeunesse pour qu’elle refuse la « haine », c’est-à-dire pour qu’elle pense dans le champ du politiquement correct.

Dans le cadre de cet embrigadement, l’enseignement de l’Histoire joue un rôle important. Les auteurs de la proposition de la loi écrivent:

Bien entendu, la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et toutes les formes de discrimination est aussi une affaire d’éducation.

Elle passe par l’école, la pédagogie, l’apprentissage de l’histoire, les rencontres, l’exemple.

Parents, école, éducateurs, médias, entreprises, femmes et hommes politiques: chacun doit y jouer un rôle17.

Nos gouvernants orchestrent donc une opération de manipulation à grande échelle, permanente et envahissante, afin de changer la société. L’objectif est de forger un monde exempt de toute discrimination.

Ils veulent créer une société de type victorienne, à la différence que le tabou ne sera pas le sexe, mais un ensemble de « pratiques discriminantes » baptisées « racisme », « antisémitisme », « xénophobie », « sexisme », « homophobie », « transphobie », « grossophobie »… sans oublier le pire: le « négationnisme ».

Big Brother surveillait les rues; avec la pénalisation des propos non publics, il surveillera désormais, les entreprises, les écoles, les gymnases, voire les maisons et les appartements. Parce que, n’en doutons pas, une foule de petits délateurs zélés sévira pour dénoncer les auteurs de propos jugés indécents.

La Chine invente le « crédit social », la France renforcera le « discrédit social »: les pointés du doigt seront poursuivis, jugés et mis au ban.

Tout cela au nom d’une intolérance assumée, car vue comme parfaitement justifiée. Lors des discussions sur la loi du 6 mars, le garde des Sceaux déclara:

« N’ayez d’intolérance que vis-à-vis de l’intolérance », écrivait le philosophe Hippolyte Taine. Aujourd’hui, j’exprime à nouveau, avec force, mon intolérance la plus ferme envers tous les comportements et discours racistes, antisémites ou discriminatoires, qui sont des parasites nuisibles de notre pacte social, de notre République18.

La complicité du peuple

Dans ses éditoriaux, Jérôme Bourbon regrette l’absence de réaction du peuple. Je souligne que parmi les 148 députés présents le 6 mars, aucun n’a voté contre le projet de loi.

Ainsi se vérifie l’adage selon lequel « on a les gouvernants que l’on mérite ». D’ailleurs, notons l’absence de complot: tout est annoncé, il suffit de lire les publications officielles.

Alain Soral dresse le même constat. Dans son ouvrage Comprendre l’époque, il souligne:

Ce projet de grande réinitialisation n’est même pas secret. Il est simplement nié par les grands médias et les agents du mondialisme, qui comptent sur la crédulité et la paresse des masses pour ne pas aller voir sur internet où tout est accessible, projet et programme19.

On en revient donc toujours à la même conclusion: parce qu’il soutient ou parce qu’il ne s’oppose pas activement, le peuple est complice de son propre assassinat.

Tant qu’il en sera ainsi, la France s’enfoncera… Peut-être même est-elle déjà morte. En 1889, Édouard Drumont prévint:

L’union des hommes crée le mensonge et l’entretient: une société peut cacher longtemps ses lésions mortelles, masquer son agonie, faire croire qu’elle est vivante encore alors qu’elle est morte déjà et qu’il ne reste plus qu’à l’inhumer20.

Le peuple français démentira-t-il ce pessimisme? La réponse lui appartient; le salut viendra de lui, à condition qu’il le veuille et qu’il fasse l’effort.